Le blogue du Québec maritime

Au large des Îles de la Madeleine... une mer de saveurs!
  • Mathieu Dupuis

Au large des Îles de la Madeleine... une mer de saveurs!

Au centre du golfe du Saint-Laurent, les Îles de la Madeleine. Des îles et des îlots reliés par des dunes de sable. Des falaises de grès rouge magnifiées par le soleil couchant. Des maisons, des hameaux de pêcheurs et des ports colorés contrastant avant le bleu du ciel et de la mer. En son large, des pêcheurs capturant des trésors culinaires. En son âme, des artisans et des chefs les sublimant.

Sous la carapace du homard des Îles, un produit d’exception

Le homard des Îles de la Madeleine est si distinctif qu'il a sa propre étiquette bien accrochée à sa pince assurant sa territorialité et sa provenance d'une même unité biologique, tel le terroir d'un grand vin. L'abondance et la finesse de sa chair, doucement salée et sucrée, sont le résultat d'une carapace durcie par les eaux froides et les fonds rocheux du Saint-Laurent qui assurent un effet protecteur.

Les Madelinots connaissent la valeur de ce crustacé. Ils l'honorent en le mangeant le plus simplement du monde et ne sont pas de ceux qui trempent ce produit délicat de la mer dans le beurre à l'ail! D'ailleurs, avant de le faire, qu'importe la sauce, goûtez à la chair exceptionnelle de ce homard, cuit généralement à la vapeur plutôt que dans l'eau bouillante, pour en apprécier sa typicité. Sur l’archipel, vous aurez aussi l'occasion de savourer le crabe des neiges, car bien entendu ce populaire crustacé y est aussi pêché.

En club sandwich, en chaudrée ou encore en salade, le homard et le crabe sont succulents lorsque frais cuits. Et, bien entendu, il y a le populaire lobster roll ou « guédille » : un pain hot-dog généreusement garni de chair de homard (ou de crabe) mélangée à une mayonnaise aromatisée. Un incontournable des casse-croûtes!

Un mot sur le fameux pot-en-pot, qui se prononce « potte-en-potte ». Si on peut dire, il s'agit d'une délicieuse chaudrée de mer, généralement composée de homard, crevettes et pétoncles, cuite entre deux abaisses de pâte feuilletée. Pour rehausser le tout, certains ajoutent du fard de homard soit un mélange de foie, d’œufs et de chair de homard, qui peut également se déguster en tartinade. On oublie les calories et on ne se prive pas de cette spécialité insulaire!

Sous des coquilles et des écailles, des produits fins et savoureux

Les Îles de la Madeleine sont reconnues pour leur pétoncle géant. La pêche hauturière de ce dernier s'effectue à l'aide d'une drague hydraulique, afin de protéger le fond marin. On le cultive aussi dans la lagune de Havre-aux-Maisons, un milieu tempéré et riche en nourriture qui permettra au pétoncle, au bout de trois ans environ, de se faire une taille impressionnante.

La meilleure façon de le savourer est assurément frais et cru avec un trait d'huile et un soupçon de citron. Goût délicat et fraîcheur assurés! Il suffit de peu pour sublimer ce mollusque, bien que servi en ceviche et rôti, il sera aussi délicieux.

La pêche aux coques (ou mye commune) est autorisée, sauf indication contraire, sur plusieurs rivages sablonneux. Sa pêche se fait toujours de façon artisanale, en creusant à la main ou à l'aide d'une fourche aux pics aplatis, généralement à marée basse. Mais le défi est de savoir identifier les bons trous où elles se cachent! Les coques ne supportent pas le voyage, donc il vous sera possible d'en cueillir, mais préférablement d'en acheter dans les poissonneries locales. À noter que l'auberge La Salicorne organise des excursions de pêche aux coques.

Les coques sont moins coriaces que les palourdes et légèrement plus sucrées. Certains pêcheurs aiment les manger crues, tout juste sorties de l'eau. Elles sont délicieuses cuites dans un bouillon au vin blanc et aromates. Bien entendu, vous les retrouverez abondamment frites, mais si la panure est toute légère, ce ne sera que du bonheur!

L'élevage de la moule bleue se pratique depuis plus de 30 ans aux Îles. Elle offre une chair plus généreuse que la moule sauvage. Cultivée en haute mer, elle aura un goût de fraîcheur de mer et de sel plus prononcé que celles élevées dans les baies intérieures.

Il existe trois huîtres présentement cultivées au Québec, dont deux aux Îles pour le plus grand plaisir des amateurs. L'huître Trésor du large est cultivée à 21 mètres de profondeur dans la mer intérieure du golfe du Saint-Laurent par Les Cultures du Large. Ce mollusque n'est pas indigène aux Îles, ses naissains provenant du Nouveau-Brunswick, passeront de deux à trois ans dans ces eaux froides pour en faire une huître d'exception et bien pleine. L'écosystème étant complètement différent d'une baie ou d'une lagune, où ses compères sont cultivés, cette huître est comme une bouchée de la mer. Sa chair est charnue, croquante et un peu plus salée. Elle est parfaite à l'apéro et de plus, facile à ouvrir!

Depuis peu, l'huître Grande-Entrée est cultivée aux Îles par Grande-Entrée Aquaculteur. Une huître un peu plus petite et moins salée, mais tout aussi délicieuse. Pour en savoir plus sur l'élevage des mollusques et la pêche au homard, visitez le site d'interprétation des Cultures du Large qui offre des excursions « mariculteur » et « pêcheur de homard ».

La pêche au maquereau est bien connue pour faire partie de l'histoire des Îles de la Madeleine. On le pêche encore aujourd'hui, mais à plus petite échelle. Vous retrouverez la chair de ce petit poisson apprêtée de bien des façons : grillée, frite, fumée, etc. On la cuit avec sa peau dépourvue d’écailles.

Du coup, gageons que vous serez tout aussi séduit par un savoureux filet poêlé ou un ceviche de joues de flétan de l'Atlantique (à ne pas confondre avec le flétan du Groenland ou turbot) En ce moment, on assiste à un regain de sa pêche, l'espèce étant bien en santé, de même que celle du petit sébaste mentalla. Une drôle de tête, mais dont la chair blanche et ferme est hautement savoureuse. Deux espèces valorisées par Fourchette Bleue (voir plus bas pour plus d'information).

Pêcher le homard et boucaner le hareng : des savoir-faire bien ancrés

Le savoir-faire des Madelinots pour la pêche au homard repose sur près de 150 ans d'histoire. C'est l'emblème du tissu social des Îles. Chaque année, la mise à l'eau des casiers à homard donne lieu à des festivités : messe des travailleurs de la mer, bénédictions des bateaux, feux d'artifice... Au jour J, toute la population de l'archipel est conviée au petit matin. La fébrilité est à son comble dans les 10 ports des Îles, où plus de 300 homardiers attendent le signal de départ. À l'île de la Grande Entrée, un festival célèbre aussi la fin de la saison.

Le boucanage du hareng était largement pratiqué aux Îles par les siècles passés, mais avec cette espèce presque disparue des eaux, se sont éteintes les 40 boucaneries. Lorsque le petit poisson est revenu frayer dans les eaux du golfe, cette tradition a pu renaître grâce à la détermination de la relève de la famille Arseneau du Fumoir d'Antan.

Alignés sur des baguettes de bois, les petits poissons cuivrés sont suspendus au-dessus de tas de braises faits de bois d'érable et de bran de scie pour être déshydratés. Ça boucane! Outre son traditionnel hareng boucané, au goût « corsé », le Fumoir d’Antan propose aussi des produits fumés au goût plus subtil. Vous pourrez visiter l’Économusée® de la boucanerie pour en apprendre davantage sur cet art.

Une saveur méconnue à démystifier et à réapprivoiser

Le phoque ou loup-marin est une viande du terroir madelinien qui revient à la table des chefs. Mais est-ce phoque ou loup-marin? Le loup marin est l'appellation ancienne, voire générique, utilisée aux Îles pour désigner, entre autres, le phoque du Groenland ou le phoque gris. On dit « loup » parce que c'est un grand prédateur de poissons. Sa chasse, très réglementée et responsable, est une activité traditionnelle pratiquée, d'abord par les Inuits, depuis plus de 3 000 ans.

Pas besoin d'être un audacieux gourmand pour découvrir cette viande sauvage qui n'est pas sans rappeler celle de l’orignal ou du cerf. Les chefs vous la proposeront avec une cuisson de type « tataki » ou en tartare, car c'est une viande très maigre (2 %). Elle ne doit donc pas être servie trop cuite, sinon c'est raté! C'est une viande douce et fondante, aucun goût de poisson, mais naturellement salée avec une note iodée qui rappelle la mer. À la Boucherie Côte à Côte, à Cap-Aux-Meules, on vous propose du saucisson sec, des mousses de foie, des merguez ou de l'effiloché au loup-marin. Il ne vous reste plus qu'à oser!

La haute mer coule dans les veines des Madelinots et fait battre le cœur de ses artisans et chefs

Ici, quelques suggestions d'adresses où la mer figure au menu :

  • Café de la Grave (Havre-Aubert) : lieu mythique des Îles où vous pourrez sympathiquement vous régaler de leur tartiflette louphoque, leur bagel au maquereau, etc.   
  • Chez Denis à François (Havre-Aubert) : restaurant-auberge situé dans une magnifique demeure ancestrale. Laissez-vous tenter par leur bouillabaisse et sa rouille, ainsi que le filet de loup-marin sauce chimichurri.
  • Resto Bistro Accents (Cap-aux-Meules) : avec une vue imprenable sur le golfe, le ceviche de pétoncles, le mignon de loup-marin sauce aux griottes ou la poutine gourmande sont à essayer.
  • Les Pas Perdus (Cap-aux-Meules) : parfait pour casser la croûte au retour de la plage dans une ambiance conviviale. À commander : la poutine du boss!
  • Quai 360 (Cap-aux-Meules) : délicieuse cuisine du marché. À essayer : le ravioli au crabe, le flétan poêlé et le risotto au homard.
  • Gourmande de nature (L'Étang-du-Nord) : boutique gourmande et bistro à la touche lumineuse et moderne. À essayer : le crabcake, le flatbread L'Insulaire à la morue salée et le taco au poisson.
  • Domaine du Vieux Couvent (Havre-aux-Maisons) : menu sans prétention offrant plusieurs choix pour découvrir les saveurs de la mer des Îles. À essayer : les buccins rôtis et les linguine aux fruits de mer.
  • Pizza d'la pointe (Havre-aux-Maisons) : les pizzas de la mer sont délicieuses! Et pourquoi ne pas faire un saut juste à côté, chez Pâtisserie Hélène des Îles? Rien de la mer, mais des desserts à y perdre son âme, comme attiré par une sirène.

Et pour casser la croûte ou pour vous procurer des produits d'exception ou en vue d'un succulent pique-nique, apéro ou repas : à la Poissonnerie Fruits de mer Madeleine à Havre-aux-Maisons et aussi à La Poissonnière de Cap-aux-Meules, vous retrouverez une grande variété de produits frais, selon les arrivages, surgelés, ainsi que des petits plats cuisinés sur place à emporter. Psst! La cantine Le Fish Shack de la Coopérative des pêcheurs Cap Dauphin à Grosse-Île offre un délicieux fish & chips au flétan.

Petite pense-bête saisonnier des saveurs de la mer

Les périodes sont à titre indicatif seulement. Ces dernières peuvent varier selon les autorisations émises par le ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne.

  • Crabe des neiges : d'avril à juin
  • Moules : d'avril à juillet
  • Pétoncle : un maximum de 14 jours, d'avril à juillet
  • Homard : de mai à juin
  • Flétan de l'Atlantique : de mai à octobre
  • Maquereau : de mai à novembre
  • Huître Trésor du Large : durant toute l'année

Repérer le logo « Fourchette bleue »! Certification octroyée par Exploramer qui reconnaît les restaurants et les poissonneries ayant choisi d'offrir au moins deux espèces marines à valoriser, c'est-à-dire qui se retrouvent en quantité suffisante dans le Saint-Laurent et dont les techniques de pêche ne nuisent pas à l'écosystème des fonds marins. Vous pouvez consulter la liste des espèces valorisées par Fourchette bleue sur leur site.

Passer à l'action avec « Mange ton Saint-Laurent! ». Une belle initiative pour redonner au Saint-Laurent son importance et sa richesse. Vous trouverez sur ce site, des articles fort intéressants ainsi que des références où se procurer des produits du Saint-Laurent ou même en commander en ligne.

À savoir également : Le Bon Goût Frais des Îles est une initiative de promotion des produits bioalimentaires de la région. Sur leur site vous pourrez consulter une liste d'adresses de producteurs-transformateurs, commerçants et restaurateurs produisant ou mettant en valeur les produits locaux.

Les Îles de la Madeleine, pour un dépaysement complet
et une mer de saveurs à découvrir!

Auteur Diane Drapeau

Au fil de nombreux projets en tourisme et en culture, Diane Drapeau a développé un attachement profond pour tout ce qui touche l'achat de proximité et le tourisme gourmand. Curieuse et passionnée par les saveurs locales, elle ne saurait voyager ou se balader sans faire un arrêt chez un artisan et en revenir les bras chargés de trouvailles. C'est ce qu'elle appelle: le bonheur! Ce ravissement lui vient d'un grand respect pour les gens qui cultivent et façonnent les produits issus de notre terroir et d'un amour indéfectible pour le Saint-Laurent et ses richesses qui subliment notre identité culinaire.

Laisser un commentaire
*

(0) commentaire