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Le crabe des neiges, vedette gastronomique du Québec maritime
  • Le crabe des neiges est un produit de la mer d'exception
    Studio du Ruisseau

Le crabe des neiges, vedette gastronomique du Québec maritime

La nuit est encore noire quand le crabier quitte la marina de Rimouski. Dans la froideur d’avril, le bateau des Pêcheries Malécites met le cap sur la Côte-Nord et traverse l’estuaire du Saint-Laurent. Au large de Forestville, le jour se lève : une ligne orangée barre l’horizon, puis une boule de feu émerge des flots. À bord, on s’active à jeter à l’eau une cinquantaine de casiers pour la prochaine pêche. Une longue journée de travail commence pour l’équipage. Après sa virée au nord, le bateau reviendra vers le Bas-Saint-Laurent relever ses premiers casiers de crabe des neiges de la saison. En après-midi, il sera dans toutes les poissonneries des régions du Québec maritime et, dès le lendemain, il envahira Montréal et Québec.

Le crabe des neiges est le roi des eaux froides et salées de l’estuaire du Saint-Laurent, un produit de la mer d’exception, estampillé Québec maritime, et le premier de classe à l’ouverture de la pêche, fin mars ou début avril, selon les années. Il se pêche aussi, plus tard au printemps, aux Îles de la Madeleine dans le golfe du Saint-Laurent ainsi qu’au sud de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve.

Pour les fins gourmets (y compris les Japonais), ce crustacé à longues pattes est meilleur que le homard. Sa chair est unique, tendre et ferme à la fois, toute en filaments délicats et fines textures, vaguement sucrée, avec un subtil goût de noisette, selon certains grands chefs. Sa valeur nutritive est aussi bonne que sa valeur gustative : pour 100 grammes de crabe, il ne procure que 115 calories, avec 23 grammes de protéines. Il est fort en fer et vitamine C, sans compter qu’il ne contient que très peu de matières grasses et de cholestérol… à condition de ne pas l’accompagner de mayonnaise ou de beurre, évidemment. Y goûter frais au printemps à la maison ou au restaurant, c’est l’adopter pour longtemps… Le reste de l’année, il est également offert congelé, décongelé et en conserve, mais il est tellement meilleur frais.

Du passé au présent

Natif du Bas-Saint-Laurent, Pierre Girardin fait la navette chaque semaine, de fin mars à début mai, entre Montréal et Rimouski pour aller chercher avec son camion réfrigéré du crabe des neiges à la marina, quand les bateaux de pêche rentrent au bercail.

« Capitaine Crabe » les vend ensuite dans les marchés publics de la métropole québécoise. Il se souvient de son enfance, quand il venait à l’arrivée des bateaux, ramasser les crabes des neiges sur le quai où les pêcheurs les jetaient. Ils n’avaient alors aucune valeur marchande et abimaient les filets à poissons! Depuis, il a largement acquis ses lettres de noblesse et c’est un produit de pêche durable, puisque bien contrôlé par des quotas qui varient d’année en année.

Le « festival » du crabe des neiges, un rendez-vous printanier

Le crabe des neiges est une belle « bête des mers » qui à un corps presque rond et plat sous une carapace brun clair ou orangée, dont la taille peut atteindre seize centimètres de diamètre pour les mâles, les seuls pêchés pour préserver l’espèce. Ce crustacé au corps rond possède cinq paires de pattes longues dont une paire de pinces. Leur poids varie de 350 grammes à 1,3 kilo. À la cuisson, il se colore d’une jolie teinte orange vif.

L’arrivée du crabe frais dans les poissonneries est quasiment synonyme d’arrivée du vrai printemps au Québec! Il s’y vend surtout cuit, après avoir été cassé vivant, en deux sections de quatre pattes plus une pince bien charnue. On sert généralement deux ou trois sections par personne en plat principal, une en entrée. Nombreux sont ceux qui préfèrent toutefois l’acheter vivant pour le cuire soi-même (pas trop) et le présenter entier lors d’un repas convivial, dans l’assiette de chaque convive.

On laisse ainsi à chacun le travail et le plaisir de décortiquer « son » crabe et de déguster la chair blanche des pattes et du dessous de la carapace, voire pour les amateurs, de manger le « far » verdâtre au goût prononcé. À défaut de le cuire plongé dans l’eau de mer, on suggère un peu de gros sel ou de sel fin dans une eau recouvrant entièrement le crabe. Dès qu’elle bout, on y plonge les crabes et quand elle bout de nouveau, il faut attendre dix à quatorze minutes avant de les retirer. À dix minutes, la chair reste bien tendre! Certains les laissent ensuite refroidir sur le comptoir de cuisine ou directement dans les assiettes, tandis que d’autres les passent sous l’eau froide, une hérésie selon les premiers. À chacun son expérience…

Simplicité volontaire

Côté recettes, les Québécois font souvent au plus simple à la maison. Une personne, un crabe dans l’assiette, un petit pot de mayonnaise-maison ou de beurre fondu (sans ail), éventuellement, une salade verte, un bol de riz basmati et surtout une pince broyeuse ou coupante et un petit pic pour extraire la chair. S’il y a des restes, on ne tarde pas à les manger : au lunch sur du pain grillé avec beurre salé ou huile d’olive; en brunch avec un œuf poché, en sandwich ou en rouleau de printemps; au souper suivant sur des pâtes… À table!

Pour en savoir plus sur le crabe des neiges, visitez le site Web de Pêches et Océans Canada

Auteur Anne Pélouas

Française d’origine, Anne Pélouas est journaliste au Québec depuis plus de 30 ans. Elle a été pendant 20 ans correspondante au Canada du prestigieux quotidien français Le Monde tout en étant journaliste pigiste, spécialisée en tourisme, plein air et art de vivre, pour des publications québécoises, créneau qu’elle conserve avec passion. Elle a sillonné toutes les régions du Québec maritime et continue à y trouver matière à émerveillement, que ce soit pour des paysages, des activités inusitées ou à cause de rencontres précieuses qu’elle y fait et qu’elle aime à raconter.

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